Subjectile
Dame de pique pyrogravure sur contreplaqué 20x20cm 2019 Catherine OLIVIER
Dans le cadre de l'exposition collective "Subjectile" organisée en Mars 2020 par la galerie HCE
Sara.H Danguis, France-Macédoine / Ndoye Douts, France- Sénégal /Meek Gichugu, France-Kenya / Yoel Jimenez, Cuba-France / Franck Lundangi, Angola-France Cristiano Mangovo, Angola-France / Miguel Marajo, France-Caraïbe/ Gastineau Massamba, Congo / Catherine Olivier, France / Katayoun Rouhi, France-Iran / Eizo Sakata, France-Japon .
"Le subjectile , c'est le papier où s'inscrit la trace, s'imprime l'encre, se dessine la déchirure ou la brûlure de cigarette, la pulsion qui atteint sa cible et frappe votre regard*..". Texte de Georges Quidet
" Les filles du feu
Cette « Dame de Pique » est un portrait, emblématique du travail de pyrogravure que Catherine Olivier poursuit depuis plusieurs années : l’image surgit des empreintes que la pointe de feu a laissées en passant sur le bois, des réactions du subjectile à l’outil, de l’association intime secrétée entre l’incise, la morsure et la brûlure du feu et la douceur, la caresse d’un pinceau, de cette union paradoxale des contraires. Dans ce portrait le feu semble avoir embrasé la chevelure de ses flammes qui n’ont fait que laisser quelques traces légères sur les traits du visage.
Les autres dessins issus de sa main et de sa forge intérieure sont habités par ce souffle de feu ; Il passe à la surface, la fragilise et l’enfièvre, ravine et creuse des sillons où la couleur peut ruisseler, fluide et frissonnante de sens, éveillant une image latente dans la profondeur du bois, un portrait, une main avec ses lignes, un arbre, une maison avec un palmier, dans un sud lointain, les fragments d’une aile d’avion. A travers les flammes les choses sont affectées d’un léger tremblement, comme si elles se mettaient à vaciller, comme si dans la solidité et leur épaisseur elles retrouvaient leur être d’air et de souffle.
Ces dessins constituent un ensemble étrange et très personnel, unifié par une gamme de couleurs sépia et nimbé dans la patine du temps, comme les archives d’un monde irréel. Cette Dame de Pique évoque la mystérieuse héroïne de Pouchkine et sa combinaison secrète pour gagner aux cartes, une figure adéquate pour cette artiste qui sait si bien apprivoiser le feu. Quant aux autres dessins, on se plait à imaginer qu’ils ont été retrouvés dans une villa antique ensevelie sous le feu ou dans les tiroirs d’une maison de famille. N’oublions pas que la maison d’enfance de Catherine a été détruite par le feu.
Catherine a déjà exposé à HCE Galerie d’autres pyrogravures, la série « les yeux fermés » en particulier, où la technique assure le passage des images vers d’autres univers. Elles bougent au gré des tropismes brésiliens qui inclinent l’artiste. La méduse qui nait de la brûlure du carton se met à flotter dans la langue polysémique de l’eau. C’est de l’eau sculptée en forme de cloche avec des tentacules, une ombrelle translucide qui évolue entre les profondeurs du « ça » aqueux et la clairière de lumière, dans la langue brésilienne de Clarice Lispector. Elle est « agua viva », eau vive et c’est ainsi qu’elle vit en portugais. Elle a perdu le pouvoir de méduser qu’elle avait dans la mythologie grecque, mais emporte tout ce qu’il y a de fascinant dans l’eau vive, la vie et la production des vies, la respiration des êtres vivants et les vibrations qu’ils dégagent.
Dans une autre version des « yeux fermés » c’est l’érotique du pied nu au contact de la nature qui se met en scène dans les empreintes du feu. D’un côté l’architecture vigoureuse de la feuille avec ses nervures, ses sillons d’énergie profondément creusés et de l’autre la corne d’un animal avec ses invraisemblables enroulements, ses plissements, ses forces d’expansion rapides, tout ce qui tend à assimiler la corne à une forme érectile. L’anglais avec son « horny » ne s’y trompe pas…La plante des pieds est connectée par ses lignes à tous les émois sensuels du corps et s’ajuste à ceux de la nature, et ça marche, ça marche bien.
On la retrouvera à HCE Galerie dans le cadre d’ Africa 2020, avec de très oniriques migrations de ses images vers l’Afrique. Catherine Olivier a été formée aux Arts-Déco de Paris, aux Beaux-Arts d’Angers. Elle a été révélée en 2007 au salon de Montrouge « Découvertes » Elle circule beaucoup, entre la Chine, le Brésil, le Bénin. Elle vit et travaille à Paris (Belleville)"
texte de Georges Quidet
Retroprojection VII pyrogravure, encre , gouache sur contreplaqué.20x20cm 2019 Catherine OLIVIER